Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/270

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l’eau paraît au-dessus fort claire, on la verse par inclination, pour ne pas troubler le sédiment, et l’on jette cette pâte dans de grands moules propres à la sécher. Avant qu’elle soit tout à fait durcie, on la partage en petits carreaux, qu’on achète par centaines. Cette figure et sa couleur lui ont fait donner le nom de pe tun tse.

Les moules où se jette cette pâte sont des espèces de caisses fort grandes et fort larges. Le fond est rempli de briques placées selon leur hauteur, de telle sorte que la superficie soit égale. Sur le lit de briques ainsi rangées, on étend une grosse toile qui remplit la capacité de la caisse : alors on y verse la matière, qu’on couvre peu après d’une autre toile, sur laquelle on met un lit de briques couchées de plat les unes auprès des autres. Tout cela sert à exprimer l’eau plus promptement, sans que rien se perde de la matière de la porcelaine, qui en se durcissant, reçoit aisément la figure des briques. Il n’y aurait rien à ajouter à ce travail, si les Chinois n’étaient pas accoutumés à altérer leurs marchandises ; mais des gens qui roulent de petits grains de pâte dans de la poussière de poivre, pour les en couvrir, et les mêler avec du poivre véritable, n’ont garde de vendre le pe tun tse, sans y mêler du marc. C’est pourquoi on est obligé de les purifier encore à King te tching, avant que de les mettre en œuvre.

Le kao lin qui entre dans la composition de la porcelaine, demande un peu moins de travail que les pe tun tse : la nature y a plus de part. On en trouve, des mines dans le sein des montagnes, qui sont couvertes au dehors d’une terre rougeâtre. Ces mines sont assez profondes ; on y trouve par grumeaux la matière en question, dont on fait des quartiers en forme de carreaux, en observant la même méthode que j’ai marquée par rapport au pe tun tse. Je ne ferais pas difficulté de croire que la terre blanche de Malthe, qu’on appelle terre de S. Paul, aurait dans sa matrice beaucoup de rapport avec le kao lin dont je parle, quoiqu’on n’y remarque pas les petites parties argentées, dont est semé le kao lin.

C’est du kao lin que la porcelaine fine tire toute sa fermeté : il en est comme les nerfs. Ainsi c’est le mélange d’une terre molle qui donne de la force aux pe tun tse lesquels se tirent des plus durs rochers. Un riche marchand m’a conté que des Anglais ou des Hollandais (car le nom chinois est commun aux deux nations) firent acheter il y a quelques années des pe tun tse, qu’ils emportèrent dans leur pays, pour y faire de la porcelaine ; mais que n’ayant point pris de kao lin, leur entreprise échoua, comme ils l’ont avoué depuis. Sur quoi le marchand chinois disait en riant : ils voulaient avoir un corps, dont les chairs se soutinssent sans ossements.

On a trouvé depuis peu de temps une nouvelle matière propre à entrer dans la composition de la porcelaine : c’est une pierre, ou une espèce de craie qui s’appelle hoa ché, dont les médecins chinois font une espèce de tisane, qu’ils disent être détersive, apéritive, et rafraîchissante. Ils prennent six parts de cette pierre, et une part de réglisse, qu’ils