Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/304

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des fourneaux. Il faut ajouter qu’on les jette d’ordinaire sur les bords de la rivière qui passe au bas de King te tching : il arrive par là qu’à la longue on gagne du terrain sur la rivière : ces décombres humectés par la pluie, et battus par les passants, deviennent d’abord des places propres à tenir le marché ; ensuite on en fait des rues. Outre cela dans les grandes crues d’eau, la rivière entraîne beaucoup de ces porcelaines brisées : on dirait que son lit en est tout pavé, ce qui ne laisse pas de réjouir la vue. De tout ce que je viens de dire il est aisé de juger quel est l’abîme, où depuis tant de siècles on jette tous ces débris de fourneaux et de porcelaines.




Des soieries


C’est de Grèce que l’Italie reçut autrefois le riche présent de la soie, laquelle sous les empereurs romains se vendait au poids de l’or. La Grèce en était redevable aux Persans, et ceux-ci, selon les auteurs qui ont écrit avec le plus de sincérité, ainsi que le marque M. d’Herbelot, avouent que c’est originairement de la Chine, qu’ils ont eu la connaissance des vers à soie, et qu’ils ont appris l’art de les élever.

Il serait difficile de trouver des mémoires d’un temps aussi reculé que ceux de la Chine, où il soit fait mention des vers à soie. Les plus anciens écrivains de cet empire, en attribuent la découverte à une des femmes de l’empereur Hoang ti nommée Si ling, et surnommée par honneur Yuen fei.

Jusqu’au temps de cette reine, quand le pays était encore nouvellement défriché, les peuples employaient les peaux des animaux pour se vêtir : mais ces peaux n’étant plus suffisantes pour la multitude des habitants, qui se multiplièrent extraordinairement dans la suite, la nécessité les rendit industrieux ; ils s’appliquèrent à faire des toiles pour se couvrir ; mais ce fut à la princesse dont je viens de parler, qu’ils eurent l’obligation de l’utile invention des soieries.

Ensuite les impératrices, que les auteurs chinois nomment selon l’ordre des dynasties, se firent une agréable occupation de faire éclore les vers à soie, de les élever, de les nourrir, d’en tirer la soie, et de la mettre en œuvre. Il y avait même un verger dans le palais, destiné à la culture des mûriers. L’impératrice accompagnée des reines, et des plus grandes dames de la cour, se rendait en cérémonie dans ce verger, et cueillait de sa main les feuilles de trois branches, que ses suivantes abaissaient à sa portée. Les plus belles pièces de soie qu’elle faisait elle-même, ou qui se faisaient par ses ordres et sous ses yeux, étaient destinées à la cérémonie du grand sacrifice qu’on offrait au Chang ti.

Il est à croire que la politique eut plus de part que toute autre raison, aux soins que se donnaient les impératrices. L’intention était d’engager