Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/324

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dévider, et contribuent à la rendre plus liée, plus forte, et moins poreuse dans sa substance. Ils servent principalement à conserver dans les œufs toute leur chaleur interne, en quoi consiste leur vertu prolifique.

Lorsqu’on voit sur les mûriers des feuilles naissantes, il est temps de songer à faire éclore les œufs : car on les hâte, ou on les retarde, selon les divers degrés de chaleur ou de fraîcheur qu’on leur donne : on les hâte, si l’on déploie souvent les feuilles de papier, et si en les fermant, on les roule d’une manière fort lâche. En faisant tout le contraire, on les retarde.

Voici quelle doit être l’occupation des trois derniers jours, qui précédent la naissance des vers. Il importe beaucoup qu’ils viennent à éclore tous ensemble. Quand ils sont prêts de naître, on voit les œufs se gonfler, et dans leur rondeur devenir un peu pointus : le premier de ces trois jours sur les dix à onze heures, lorsque le Ciel est serein et qu’il fait un petit vent tel qu’il y en a pour lors, on tire du vase ces précieux rouleaux de papier, on les étend en long, on les suspend, en sorte que le dos soit tourné au soleil, on les y tient jusqu’à ce qu’ils aient une chaleur douce et tempérée. On les roule ensuite d’une manière serrée, et on les remet de leur hauteur dans le vase en un lieu chaud, jusqu’au lendemain qu’on les retire de la même façon, et qu’on fait la même manœuvre.

On remarquera ce jour-là que les œufs changent de couleur, et deviennent d’un gris cendré. Alors on joint les feuilles de papier deux à deux, on les roule plus serrées, on lie même les deux extrémités. Le troisième jour sur le soir on déplie les feuilles et on les étend sur une natte fine : les œufs paraissent alors noirâtres : s’il y avait quelques vers d’éclos, ils doivent être réprouvés : la raison est qu’ils ne seraient jamais vers de communauté : l’expérience a appris que ces sortes de vers, qui ne sont pas éclos en même temps que les autres, ne s’accordent jamais avec eux pour le temps de la mue, du réveil, des repas, ni, ce qui est de principal, pour le temps où se fait le travail des coques : ces vers bizarres multiplieraient les soins et les embarras, et par ce dérangement causeraient de la perte : c’est pourquoi on les bannit de bonne heure. Cette séparation étant faite, on roule trois feuilles ensemble d’une manière fort lâche, qu’on transporte dans un lieu bien chaud, et qui soit à l’abri du vent du midi. Le lendemain sur les dix à onze heures on tire les rouleaux, on les déplie, et on les trouve pleins de vers qui sont comme autant de petites fourmis noires, et c’est en effet le nom qu’on leur donne, he y : les œufs qui environ une heure après ne seront point éclos, doivent être abandonnés. Si parmi ces vers nouvellement nés, on en distingue qui aient la tête plate, qui soient secs et comme brûlés, qui soient d’un bleu céleste, ou jaunes, ou de couleur de chair, ne songez point à les élever ; les bons sont ceux qui paraissent de la couleur d’une montagne qu’on voit de loin.

Ce qu’on conseille d’abord de faire, c’est de peser dans une balance la feuille qui contient les vers nouvellement éclos. Ensuite on présentera cette feuille inclinée, et à demi renversée, sur une longue feuille de papier semée