Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/408

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absolu, abusaient des faits rapportés dans le Chu king, et ne parlaient sans cesse que d’un Tching tang, qui chassa l’infâme Kié, et d’un Vou vang, qui détrôna le tyran Tcheou. Par ces discours, ils soufflaient de tous côtés le feu de la révolte. Le nouveau monarque résolut de châtier leur insolence et jugeant qu’il n’y a rien de plus précieux dans un vaste empire, que la paix, il ôta aux lettrés des livres, qui entre leurs mains ne causaient que du trouble. L’y king ne fut point brûlé comme les autres, parce qu’étant moins intelligible, on le jugeait moins dangereux.

C’en était fait des sciences, et elles eussent été entièrement éteintes, si plusieurs lettrés n’eussent hasardé leur propre vie, pour sauver de l’incendie général des monuments qui leur étaient si chers. Les uns ouvrirent les murs de leurs maisons, et les y ensevelirent, pour les retirer ensuite, quand l’orage serait passé. Les autres les cachèrent dans les tombeaux, où ils les crurent plus en sûreté. Enfin l’empereur vint à mourir.

Aussitôt après la mort de ce prince, l’amour des lettres se réveilla dans les esprits, et l’on songea aux moyens de réparer une perte si considérable. On retira ces livres des tombeaux et des trous de murailles, où ils avaient été cachés. L’humidité et les vers les avaient fort endommagés ; mais comme les lettrés d’un âge avancé les avaient appris par cœur dans leur jeunesse, et qu’en comparant ensemble les exemplaires, on pouvait suppléer ce qui était effacé dans les uns, par ce qui se trouvait en entier dans les autres, on s’appliqua avec grand soin à rétablir ces livres dans leur premier état.

On y réussit en partie ; mais quelque soin que l’on se donna, on ne pût venir à bout de réparer entièrement les défectuosités de cet ouvrage. Ainsi il y resta toujours quelques lacunes, auxquelles on croit qu’on a suppléé, en y insérant des pièces étrangères, qui ne se trouvaient point dans les originaux. Les lettrés conviennent de quelques-uns de ces défauts, et disputent entr’eux sur les autres : leur critique consiste à démêler le fond de la doctrine des anciens, d’avec ce qui a pu y être ajouté de nouveau.





L’Y KING


Premier Livre Canonique du premier Ordre


L’ouvrage, dont il est ici question, est purement symbolique : ce n’est qu’un tissu d’images de ce monde visible, qui expriment les propriétés des créatures, et la matière dont tous les êtres ont été formés. Fo hi qui en est l’inventeur, est regardé comme le fondateur de la monarchie ; mais le temps auquel il a commencé de régner, est fort incertain parmi les Chinois. Il se fit une méthode particulière des hiéroglyphes, qui n’ont nul