Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/715

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et votre illustre postérité n’aura qu’à vous imiter, pour continuer de régner en paix.

Que si au contraire V. M. menant une vie oisive dans son palais, et se livrant à ses plaisirs, laissait toute l’autorité à quelqu’un de ses officiers, si sans examiner qui a du mérite ou qui n’en a point, sans distinguer la véritable vertu du vice artificieusement déguisé, et sans faire attention aux conséquences, vous mettiez indifféremment dans les emplois les premiers qui se présentent ; ou bien, ce qui serait encore pis, si prenant pour toute règle vos inclinations et vos ressentiments, vous éloigniez tous ceux qui vous ont autrefois déplu, et n’avanciez que ceux pour qui vous vous êtes toujours senti de l’inclination ; si les récompenses étaient pour des flatteurs sans mérite et sans services, les châtiments pour des gens fidèles et zélés, dont la droiture serait tout leur crime, aussitôt tout serait en confusion à la cour et dans les provinces ; plus de lois, plus d’ordre, plus de paix : y aurait-il rien de plus funeste et pour tout l’empire en général, et pour V. M. en particulier ?

Voilà pourquoi j’ai dit, que comme en matière de perfection particulière, la piété filiale est la première des vertus ; de même en matière de gouvernement, c’est l’équité. Du cas ou du mépris qu’un prince fait de ces deux vertus, dépend plus que de toute autre chose le bonheur ou le malheur de son État, la honte ou la gloire de son règne. Pesez-bien cette vérité, pour vous animer à bien pratiquer ces deux vertus capitales.


Une glose dit de Se ma kuang auteur de ce discours, qu’il était bon fils, bon ami, bon sujet, que c’était un homme d’une probité reconnue, d’une gravité respectable, d’une tempérance singulière, et d’une droiture à toute épreuve. Il fut ministre sous quatre empereurs. On ne le vit jamais se démentir.


Autre discours du même Se ma kuang au même empereur Yng tsong, à l’occasion des calamités publiques.


Depuis que V. M. est sur le trône, voici bien des phénomènes extraordinaires, et bien des calamités publiques. Il a paru des taches noires dans le soleil. Il y a eu successivement des inondations et des sécheresses. Pendant l’été de l’année dernière, commencèrent de grosses pluies, qui ne finirent qu’après l’automne. Au sud-est de votre cour, dans le territoire de plus de dix villes, on a vu les maisons grandes et petites, ou abîmées dans les eaux, ou flottantes et portées sur le sommet des arbres. Combien de familles ruinées par là. Aussi trouve-t-on de tous côtés des malheureux de tout âge ; le fils séparé du père, et l’un et l’autre accablés sous le poids de leur misère. Les parents vendent leurs enfants, les maris leurs femmes, et ils les donnent à plus bas prix, que ne se vendent