Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/801

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Ne cherchons point dans les temps passés des exemples qui le prouvent. De nos jours nous avons vu en place un Han tchi tcheou, âme basse et petit génie : fier du crédit qu’il avait su trouver auprès de V. M., il décidait de tout à sa tête. Aussi eut-il tout le monde contre lui. Il a bien pu pendant quelque temps faire préférer le mal au bien, ses idées ou ses intérêts aux sages avis des gens droits et sensés. Mais il est enfin mort dans les supplices qu’il méritait par plus d’un endroit : et sa funeste fin a glorieusement vengé les grands hommes, dont il méprisait les sages avis. En effet, ordinairement la voix commune est celle de la raison, et la raison est elle-même la voix du Tien. C’était donc Tien que Tchi tcheou méprisait. Le pouvait-il faire impunément ? Les bons princes et les bons ministres en usent tout autrement. Le respect qu’ils ont pour Tien, leur fait respecter la voix publique et les délibérations communes. Par là ils gagnent le cœur des peuples, et s’attirent le secours de Tien. Avec cela qu’ont-ils à craindre ? Par la juste punition d’un indigne favori, vous avez fait un grand pas vers le droit chemin ; mais je crains qu’un mal qui avait duré du temps ne soit pas encore tout à fait guéri. Vous ne sauriez trop vous précautionner contre une rechute. Parlons sans figure. Vous avez senti le danger qu’il y a pour un prince de se trop livrer à un sujet par inclination ou autrement, et de n’écouter que lui seul. Soyez constant dans un si heureux retour. Fondez votre gouvernement, non sur des vues que suggère en secret un seul homme, soufflé souvent par une cabale, ou animé par l’intérêt, mais sur des délibérations communes et sur l’avis du grand nombre. Dans les résolutions que vous aurez à prendre, cherchez sincèrement et de bonne foi, comme étant en présence de Chang ti, le parti le plus équitable. Tien et les hommes s’en réjouiront et tout l’empire s’en sentira. Pesez avec attention ce que je prends la liberté de vous exposer.


Sur ce discours, l’empereur Cang hi dit : il est plein d’expressions vives et de tours frappants. Il n’y a rien qui ne fit honneur à la plus saine antiquité.


Extrait d’un autre discours du même Tching te sieou, à l’empereur Li tsong.


Prince, ce qu’il y a de plus important pour un prince, qui cherche, comme vous, à bien gouverner, c’est de gagner le cœur de Tien et le cœur des hommes : et c’est en gagnant le cœur de ses sujets qu’un souverain gagne le cœur de Tien. Dans l’Y king, sur un des traits du symbole nommé Ta yeou, on lit ces paroles : Dès que Tien le protège, il est heureux, tout tourne à son avantage. Confucius commentant ce texte, dit : Quel est celui que Tien protège, si ce n’est celui qui s’attire sa protection par son respect et