Page:Duchaussois - Aux glaces polaires, Indiens et Esquimaux, 1921.djvu/104

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gnait, de Saint-Boniface, par la prairie, en deux mois de marche seulement, et qu’il conduisait directement à la rivière Athahaska, dont il est le tributaire, au moyen de sa propre décharge, la petite rivière la Biche.

Mgr  Taché conçut ce projet, en 1855, alors qu’il était l’unique évêque du Nord-Ouest, et qu’il n’était pas encore question des vicariats de Saint-Albert et de l’Athabaska-Mackenzie.

Il travailla immédiatement à le mettre en œuvre, en envoyant, à la place du Père Rémas, qui végétait depuis deux ans au lac la Biche, deux hommes parfaitement doués pour mener à bien l’entreprise : les Pères Tissot et Maisonneuve.

L’année suivante, 1856, Mgr  Taché lui-même arrivait sur l’emplacement à peine défriché de la future mission Notre-Dame des Victoires du lac la Biche ; et, résolu à dénouer en personne le mystère des rapides, il s’engagea, en canot d’écorce, dans l’exploration de cet itinéraire redouté, où son expérience allait entraîner tant de convois : la traversée du lac la Biche, la descente de la petite rivière la Biche, et le saut des rapides de l’Athabaska.

Il a laissé quelques phrases sur son audacieux essai :

« Cette partie du fleuve géant était décrite comme pleine de dangers et d’une navigation presque impossible. L’évêque de Saint-Boniface, devant se rendre au lac Athabaska, choisit cette route inconnue et réputée si dangereuse. Il eut le plaisir de constater qu’il y avait beaucoup d’exagération dans tous ces récits effrayants, et que cette rivière ressemble à tant d’autres sur lesquelles on navigue tous les jours. Après sept jours et deux nuits d’une marche heureuse, il arrivait à 2 heures du matin, pour donner le Benedicamus Domino aux missionnaires du lac Athabaska. C’était le 2 juillet, joli jour pour une visite ! Les Pères Grollier et Grandin, et le Frère Alexis, réveillés en sursaut à la voix de leur évêque, versèrent des larmes de joie, en voyant leur supérieur plus tôt qu’ils ne l’attendaient, et échappé heureusement aux dangers prétendus, mais supposés réels, de cette navigation. »


Mgr  Taché parlait donc des plus grands « dangers » du Nord avec l’indifférence que mettent nos poilus à raconter leurs batailles. Il s’y était habitué. Puis, c’était un modeste. Enfin, il écrivait en 1865, date où il importait de ne pas décourager ses missionnaires.