Page:Dufay - L’Impôt Progressif sur Le Capital et le Revenu, 1906.djvu/118

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il rappeler ici cette page du grand moraliste qui a peint si éloquemment, il y a deux siècles, les premières manifestations de notre décadence[1]. « Il y a des âmes sales, pétries de boue et d’ordure, éprises du gain et de l’intérêt, comme les belles âmes le sont de la gloire et de la vertu capables d’une seule volupté, qui est celle d’acquérir ou de ne point perdre ; curieuses et avides du denier dix, uniquement occupées de leurs débiteurs, toujours inquiètes sur le rabais, ou sur le décri des monnaies, enfoncées et comme abîmées dans les contrats, les titres et les parchemins. De telles gens ne sont ni parents, ni amis, ni citoyens, ni chrétiens, ni peut-être des hommes : ils ont de l’argent. »

Faut-il citer aussi ce jugement d’un ancien ministre, M. Hanotaux, bien placé au milieu de ce Paris plein d’or et de misère pour voir de près et toucher notre plaie sociale :

« La corruption est la suite des grandes transformations économiques. Quand les procédés du travail se sont modifiés, quand des richesses nouvelles ont été créées, quand des mondes inexploités se sont ouverts, quand l’épargne accumulée a gonflé les sacs et les coffres, quand l’usure a épuisé la prospérité publique, quand des fortunes immenses se sont élevées sur d’immenses ruines, quand des krachs soudains ont ajouté à l’irritabilité réciproque

  1. Caractère de La Bruyère. — Des biens de fortune.