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— Y a-t-il des Français ? dit-elle en passant au sous-officier distributeur.

— Un fourgon seulement, lui répondit-il pressé.

Elle eût bien voulu rester encore, mais le Devoir était là haut, et lui assignait pour l’heure une besogne rebutante. Elle monta. Le soir, à la contre visite, le major Boisse, qui assumait la charge de traiter les hostiles, commença le pansement tout en causant avec son infirmière. Un des malheureux avait la jambe dans un tel état, que pour la mettre dans une gouttière, — sans le faire hurler, — le médecin proposa :

— Pourriez-vous lui donner un peu de somnoforme pendant que je ferai le nécessaire.

— Mais certainement, docteur.

Très douce, elle prit le masque de gaze et versa le soporifique tout en surveillant le pouls du blessé. Le major, lui, continuait à bavarder ; il racontait la victoire belge, et nos succès dans le Nord. Tout à coup il se souvint.

— À propos… il y a un Bertol dans les Français nouveaux venus, c’est peut-être un de vos parents ?

— Bertol, cria presque Sylvia ; c’est mon mari.

— Mais non, il est porté Maurice Bertol ; il n’y a pas de Maingaud.

— C’est lui, c’est lui… où est-il ? quelle division ?

Mue par un très excusable élan d’amour, elle posait le flacon de somnoforme et ne songeait qu’à rejoindre son époux lorsque le malade geignit.