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maison, sur la route d’Albaincourt à Chaulnes).

Enfin Robert, merveilleusement doué au point de vue musical, était le Benjamin de sa mère, dont il berçait, au piano, tous les rêves et toutes les déceptions.

Au moment où l’empereur d’Allemagne signa l’arrêt de mort de tant d’hommes, Madame Lartineau était devenue, physiquement, une créature assez effacée, n’ayant plus, pour attrait, qu’une suprême distinction. Les frais d’éducation de cinq garçons avaient grevé son budget, au point de réduire au strict nécessaire ses dépenses somptuaires. Elle s’était accoutumée de bonne heure à une extrême simplicité, et quand l’âge obscurcit les clartés de son teint, elle resta sans beauté. De petits héritages lui vinrent plus tard qui lui auraient permis de rehausser sa mise d’une élégance de coupe chèrement acquise, mais, à ce moment, deux aventures lui avaient ôté la foi en l’amour de son mari.

Entre la naissance de Joseph et celle de Robert, Monsieur Lartineau, alors lieutenant, était allé en Cochinchine. On y faisait une petite campagne contre des soulèvements d’indigènes, et, comme il avait hâte de gagner son troisième galon, il accepta de partir. Seulement, une femme et quatre enfants sont un embarras et une dépense trop lourde pour une solde d’officier ; les époux se concertèrent, et la raison triompha de leur tendresse. Il partit seul, la laissant à Lyon, et les courriers d’Orient transpor-