Page:Dulaurens - Imirce, ou la Fille de la nature, 1922.djvu/200

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
180
IMIRCE OU LA FILLE DE LA NATURE

« La gomme dont le sapin est rempli, disait-il, a la même vertu que le baume du Commandeur, où il entre de la gomme arabique et de l’encens ».

Ces pansements eurent le succès le plus heureux : quatre jours après, les trois échevins de Chenonceaux reprirent leur métier. Je quittai cet endroit. Je vins ici ! moment fortuné qui m’a procuré le bonheur de trouver ce qu’il y avait de plus cher au monde pour moi.

Ma fille ayant fini son histoire, je descendis chez le fermier ; je trouvai dans la cour du château un homme avec une mauvaise perruque, un habit bleu sans boutons, un sac derrière le dos ; il avait un air de bêtise et de bonté, il me demanda l’aumône : « Mon ami, lui dis-je, as-tu du pain ? — Grâces au ciel, madame, j’en trouve de toutes les couleurs ; ce qui m’embarrasse, c’est la couchée, je me repose tantôt sous un arbre, tantôt à la porte d’une église : de grâce, donnez-moi deux sols pour payer mon gîte, je prierai Dieu pour vous. — Que dis-tu ? — J’adresserai mes prières au Ciel pour la conservation de vos jours et la prospérité de votre maison. — Donne-toi garde de prier Dieu pour moi ! je le prie moi-même, je ne donne pas d’argent à personne pour faire cette commission. — Madame, le curé de votre paroisse, qui a l’âme dure comme l’enclume de votre maréchal m’a fait le même compliment, il m’a répondu qu’il était du métier, qu’il priait Dieu pour les autres. — Il a raison, il gagne plus d’argent que toi ; pourquoi fais-tu le tien sans être