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DÉPARTS ET ARRIVÉES

Les arrivées les moins drôles sont celles des prisonniers libérés et arrêtés de nouveau quelque temps après pour être ramenés au camp. Il y eut quatre ou cinq de ces pénibles cas de retour.

Parmi les départs, il faut également citer le cas de ceux qui quittaient temporairement le camp pour des raisons de santé. Ils étaient envoyés à l’hôpital de la ville voisine ou au centre médical du grand camp militaire installé à une dizaine de milles de notre première petite ville.

Précisément, pour un examen des yeux, je fus amené une fois, en novembre 1940, au centre médical militaire… C’était ma première sortie depuis le mois de juin… La sensation éprouvée, me trouvant en auto, de voir devant moi l’espace libre me grisa complètement. Au retour, en pénétrant dans la forêt, j’eus l’impression d’être enseveli vivant dans les arbres. Je sentais la vitesse de l’auto qui me ramenait au camp, comme on sent dans le corps le progrès d’un événement organique mortel…

Pour la même raison, je retournai à l’hôpital de la ville voisine de notre deuxième camp, plus de deux ans après… La ville, capitale de la province, était coquette, charmante et propre. La surveillance était alors bien plus relâchée, et nous jouissions presque d’un régime de demi-liberté. Nous restâmes une bonne partie de la journée à l’hôpital militaire sous l’escorte de deux ou trois soldats, et il nous fut même permis de faire une petite promenade autour de l’hôpital et dans les rues.