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LA REINE MARGOT.

visage trahissait son émotion, et alla s’appuyer sur la barre de la fenêtre.

La petite levrette poussa un gémissement.

Au même instant deux personnes entraient, l’une annoncée et l’autre qui n’avait pas besoin de l’être.

La première était René, le parfumeur, qui s’approcha de Catherine avec toutes les obséquieuses civilités des serviteurs florentins ; il tenait une boîte, qu’il ouvrit, et dont on vit tous les compartiments remplis du poudres et de flacons.

La seconde était madame de Lorraine, sœur aînée de Marguerite. Elle entra par une petite porte dérobée qui donnait dans le cabinet du roi, et, toute pâle et toute tremblante, espérant n’être point aperçue de Catherine qui examinait avec madame de Sauve le contenu de la boîte apportée par René, elle alla s’asseoir à côté de Marguerite, près de laquelle le roi de Navarre se tenait debout, la main sur le front, comme un homme qui cherche à se remettre d’un éblouissement.

En ce moment Catherine se retourna.

— Ma fille, dit-elle à Marguerite, vous pouvez vous retirer chez vous. Mon fils, dit-elle, vous pouvez aller vous amuser par la ville.

Marguerite se leva, et Henri se retourna à moitié.

Madame de Lorraine saisit la main de Marguerite.

— Ma sœur, lui dit-elle tout bas et avec volubilité, au nom de M. de Guise, qui vous sauve comme vous l’avez sauvé, ne sortez pas d’ici, n’allez pas chez vous !

— Hein ! que dites-vous, Claude ? demanda Catherine en se retournant.

— Rien, ma mère.

— Vous avez parlé tout bas à Marguerite.

— Pour lui souhaiter le bonsoir seulement, Madame, et pour lui dire mille choses de la part de la duchesse de Nevers.

— Et où est-elle, cette belle duchesse ?

— Près de son beau-frère M. de Guise.

Catherine regarda les deux femmes de son œil soupçonneux, et fronçant le sourcil :

— Venez , Claude ! dit la reine mère.

Claude obéit. Catherine lui saisit la main.

— Que lui avez-vous dit ? indiscrète que vous êtes ! murmura-t-elle en serrant le poignet de sa fille à la faire crier.