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Page:Dumas, Ascanio, t2, 1860.djvu/323

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ASCANIO.

Quint, les arrhes de certain marché qui doit enlever le duché de Milan à la France fassent un bon effet ?

— Vous parlez en énigmes, mon cher orfèvre ; malheureusement le roi va venir, et je n’ai pas le temps de devinet les vôtres.

— Je vais vous en dire le met, alors. Ce mot est un vieux proverbe : Verba volant, scripta manent, ce qui veut dire : Ce qui est écrit est écrit.

— Eh bien ! voilà ce qui vous trompe, mon cher orfèvre, ce qui est écrit est brûlé : ne croyez donc pas m’intimider comme vous feriez d’un enfant, et donnez-moi ce lis, qui m’appartient.

— Un instant, madame, mais auparavant je dois vous avertir que talisman entre mes mains, il perdra toute sa vertu entre les vôtres. Mon travail est encore plus précieux que vous ne le pensez. Là où la foule ne voit qu’un bijou, nous autres artistes nous cachons parfois une idée. Souhaitez-vous que je vous montre cette idée, madame ?… Tenez, rien de plus facile, il suffit de pousser ce ressort invisible. La tige, comme vous le voyez, s’entrouvre, et au fond du calice on trouve, non pas un ver rongeur comme dans certaines fleurs naturelles ou dans certains cœurs faux, mais quelque chose de pareil, de pire peut-être, le déshonneur de la duchesse d’Etampes écrit de sa propre main, signé par elle.

Et tout en parlant Benvenuto avait poussé le ressort, ouvert la tige et tiré le billet de l’étincelante corolle. Alors il le déroula lentement et le montra tout ouvert à la duchesse, pâle de colère et muette d’épouvante.

— Vous ne vous attendiez guère à cela, n’est-ce pas, madame ? reprit Benvenuto avec sang-froid en repliant la