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Page:Dumas, Ascanio, t2, 1860.djvu/324

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ASCANIO.

lettre et en la replaçant dans le lis. Si vous connaissiez mes habitudes, madame, vous seriez moins surprise ; il y a un an, j’ai caché une échelle dans une statuette ; il y a un mois j’ai caché une jeune fille dans une statue ; aujourd’hui, que pouvais-je glisser dans une fleur ? un papier tout au plus, et c’est ce que j’ai fait.

— Mais, s’écria la duchesse, ce billet, ce billet infâme, je l’ai brûlé de mes propres mains ; j’en ai vu la flamme, j’en ai touché les cendres !

— Avez-vous lu le billet que vous avez brûlé ?

— Non ! non ! insensée que j’étais, je ne l’ai pas lu !

— C’est fâcheux, car vous seriez convaincue maintenant « que la lettre d’une grisette peut faire autant de flamme et de cendres que la lettre d’une duchesse. »

— Mais il m’a donc trompée, ce lâche Ascanio !

— Oh ! madame, oh ! arrêtez-vous ; ne soupçonnez pas même ce chaste et pur enfant, qui, en vous trompant du reste, n’eût employé contre vous que les armes dont vous vous serviez contre lui. Oh ! non, non, il ne vous a pas trompée : il ne rachèterait pas sa vie, il ne rachèterait pas la vie de Colombe par une tromperie. Non, il a été trompé lui-même,

— Et par qui ? dites-moi cela.

— Par un enfant, par un écolier, par celui qui a blessé votre affidé, le vicomte de Marmagne, par un certain Jacques Aubry enfin dont le vicomte de Marmagne a dû vous dire deux mots.

— Oui, murmura la duchesse, oui, Marmagne m’a bien dit que cet écolier, ce Jacques Aubry, cherchait à pénétrer jusqu’à Ascanio pour lui enlever cette lettre.

— Et c’est alors que vous êtes descendue chez Ascanio ;