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Vuillemot


il vint à Paris et entra chez M. Very, du Palais-Royal, ami de son père, ou il resta deux ans, après lesquels il entra dans la maison du roi sous les auspices de MM. Pierre Hugues et Desmonay, de la maison royale, vieux amis de la famille Vuillemot.

Plus tard, Vuillemot brûlant du feu sacré, rencontra l'illustre Carème, devint son élève et son ami et acheva par lui son education culinaire.

En 1837, Vuillemot prit l'établissement de son père à Crepy ; en 1842, il acquit l'hôtel de la Cloche, à Compiègne, et s’associa à M. Morliere, et ils restèrent quinze ans ensemble dans un parfait accord.

£n l'annee 1842, il fit les grands diners commandés parle duc de Nemours, après la mort de son frère, au retour du camp de Chilons. A cette époque, j’eus l'occasion de retrouver Vuillemot. Je l'avais connu à Crépy, chez son père. A mon retour d’un voyage de Lille avec Dujarrier et quelques amis, je le revis à l'hôtel de la Cloche, et voici comment :

Harassé de fatigue et mourant de faim, j’interpellai vivement en ces termes : «Holà ! n’y a-t-il pas à nous servir des roues de cabriolet à l’oseille, et des manches de couperet à la Sainte-Menehould ?" Vuillemot, qui n’était pas en retard de réplique et qui, par son guichet, venait de me reconnaitre, dit : «Monsieur, il ne nous reste plus que des côtelettes de tigre et du serpent à la tartare.» Sur ce, je reconnus mon Vuillemot, celui-là même dont les saillies m’amusaient dans la maison de son père ; je lui tendis la main, et l'intimité ainsi scellée à nouveau ne l'empêcha pas de faire acte de cuisinier accompli. A partir de ce moment amical et gastronomique, mes relations avec Vuillemot se sont continuées, et je me souviens avoir été témoin au mariage de sa fiUe ainée, fêtes nuptiales qui furent pour moi les fêtes de Comus, suivies de si parfaits loisirs, à Compiègne, que, au milieu de ces hôtes qui fêtaient ma bienvenue, je terminal mon Monte-Cristo.

Ce roman fut achevé à Pompadour, propriété de l'Etat, que hante encore l'ombre de l'illustre marquise, et que venaient de louer Vuillemot et Morliere.