Page:Dumas - Œuvres - 1838, vol.2.djvu/605

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SANDOVAL.

Elle commence par doña Fausta, femme d’un pêcheur.

DON JUAN.

Et finit par la signora Luisa, maîtresse d’un pape… Vous voyez que l’échelle sociale est parcourue, et que chaque classe m’a fourni son contingent.

SANDOVAL.

Erreur !…

DON JUAN.

Comment cela ?

SANDOVAL.

Le loup est entré dans le bercail, c’est vrai ; mais il a laissé échapper la plus belle et la plus tendre de toutes les brebis.

DON JUAN.

Laquelle ?

SANDOVAL.

Celle du Seigneur.

DON JUAN.

C’est par Dieu vrai ! Il n’y a pas de religieuses… Messieurs, j’engage devant vous ma foi de gentilhomme qu’avant huit jours cette lacune sera remplie.

SANDOVAL.

Maintenant, jouons !

DON JUAN.

À vos ordres.

SANDOVAL.

Gomez, des cartes !

DON JUAN.

Gomez, des dés !

SANDOVAL.

Vous préférez ?…

DON JUAN.

Cela va plus vite.

SANDOVAL.

Parfaitement.

DON JUAN.

Votre enjeu ?

SANDOVAL, jetant sa bourse.

Ce que j’ai sur moi.

DON JUAN, jetant la sienne.

Va !

SANDOVAL.

Votre bourse paraît mieux garnie que la mienne.

DON JUAN.

Oh ! Entre gentilshommes, on n’y regarde pas de si près.

SANDOVAL, secouant les dés.

En trois coups ?

DON JUAN.

En un seul, s’il plaît à Votre Honneur ?

SANDOVAL, amenant.

Cinq !

DON JUAN.

Sept !

SANDOVAL.

Ma revanche ?

DON JUAN.

Volontiers… Que jouons-nous, cette fois ?

SANDOVAL.

J’ai perdu tout ce que j’avais d’argent comptant.

DON JUAN.

Votre parole est bonne…

SANDOVAL.

Cette agrafe vaut encore mieux.

DON JUAN.

Cette chaîne !…

SANDOVAL.

Très bien… Neuf !

DON JUAN.

Onze !…

SANDOVAL.

J’ai dans les Algarves un vieux manoir de famille.

DON JUAN.

J’en possède trois dans les deux Castilles.

SANDOVAL.

Château contre château.

DON JUAN.

Le vôtre se nomme ?

SANDOVAL.

Almonacil.

DON JUAN.

Choisissez, de Villa-Mayor, d’Aranda ou d’Olmedo.

SANDOVAL, jetant les dés sur la table.

Onze ! Pour Villa-Mayor.

DON JUAN, les jetant à son tour.

Douze ! Pour Almonacil.

SANDOVAL, se levant.

Voyons si vous aurez le même bonheur à un autre jeu.

DON JUAN.

Êtes-vous déjà las de celui-ci ?

SANDOVAL.

Je n’ai plus rien au monde, que ma maîtresse.

DON JUAN.

Son nom ?

SANDOVAL.

Doña Inès, comtesse d’Almeida.

DON JUAN.

Cette bourse, cette agrafe et Almonacil, contre Doña-Inès d’Almeida.

SANDOVAL.

Vous êtes fou, Don Juan !

DON JUAN.

Prenez garde, seigneur cavalier !… C