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SAINT-MÉGRIN.

Adieu, sire…

HENRI.

Jeune, brave, aimé de ton roi, tu iras loin, Saint-Mégrin, je te le promets.

SAINT-MÉGRIN.

Merci, sire, merci…

HENRI.

Adieu…

SAINT-MÉGRIN.

Adieu, sire, adieu.


Scène VIII.


SAINT-MÉGRIN, GEORGES.
SAINT-MÉGRIN.

Je suis seul, enfin ! — (Appelant.) Georges… ah ! te voilà… Mon costume… bien… aide-moi… aide-moi…

GEORGES.

Vous allez sortir… Voulez-vous que je fasse venir une chaise à porteurs ?

SAINT-MÉGRIN.

Non…

GEORGES.

Le temps est à l’orage…

SAINT-MÉGRIN.

Oui. — (Allant à la fenêtre avec un rire convulsif.) Il n’y aura bientôt plus une étoile au ciel…

GEORGES.

Et vous allez sortir à pied ?

SAINT-MÉGRIN.

Oui, à pied…

GEORGES.

Sans armes…

SAINT-MÉGRIN.

J’ai mon épée et mon poignard, cela suffit… Cependant donne-moi l’épée de Schomberg ; elle est plus forte.

GEORGES.

La voilà… Voulez-vous que je vous accompagne ?…

SAINT-MÉGRIN.

Non. Il faut que je sorte seul.

GEORGES.

À minuit passé… que dirait votre mère ?

SAINT-MÉGRIN, à la fenêtre.

Ma mère… oui, oui, tu as raison… L’orage s’étend… Ma pauvre mère, je voudrais bien la revoir… ne fût-ce qu’un instant. Écoute : tu lui donneras cette chaîne, — (Coupant une boucle de cheveux avec son poignard.) ces cheveux, demain, si tu ne me revois pas, entends-tu.

GEORGES.

Et pourquoi, monseigneur, pourquoi ?…

SAINT-MÉGRIN.

Tu ne sais pas, tu ne peux pas savoir… je ne puis pas te dire… Donne-moi mon manteau…

GEORGES.

Mon maître… mon jeune maître… ne sortez pas, au nom du ciel… la nuit sera terrible.

SAINT-MÉGRIN.

Oui, terrible, peut-être… N’importe, il le faut, elle m’attend, j’ai tardé beaucoup… Oh ! s’il allait être trop tard…

GEORGES.

Au nom du ciel, laissez-moi vous suivre.

SAINT-MÉGRIN, avec colère.

Reste, je te l’ordonne.

GEORGES.

Mon maître !

SAINT-MÉGRIN, lui tendant la main.

Non, embrasse-moi… adieu… adieu… n’oublie pas ma mère !