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ACTE QUATRIÈME.

 


Le théâtre représente la loge de Kean.


Scène PREMIÈRE.

 

PISTOL, SALOMON, préparant des verres d’eau au sucre.
PISTOL.

Dites donc, père Salomon, sans être trop curieux, qu’est-ce que vous faites là, hein ?

SALOMON.

Je prépare un verre d’eau au sucre.

PISTOL.

Eh bien ! le père Bob est comme M. Kean… il faut toujours qu’il se gargarise dans les entr’actes… seulement, lui, c’est avec du rhum.

SALOMON.

Oh ! si je n’avais pas de la raison pour deux, nous en ferions bien autant, nous ; mais je suis là-dessus d’une sévérité incorruptible : de temps en temps je permets le verre de grog, mais jamais plus.

PISTOL.

Et vous avez raison… — (Regardant dans l’armoire.) Qu’est-ce que c’est que toutes ces friperies-là… hein ?

SALOMON.

Comment, drôle ! tu appelles cela des friperies, toi… des costumes magnifiques ?

PISTOL.

Du d’or… du vrai d’or… oh ! oh ! oh !… Excusez alors, il y en a pour quelques schelings là dedans.

SALOMON, se rengorgeant.

Mais nous en avons une, garde-robe, qui vaut deux mille livres sterling, rien que ça…

PISTOL.

Alors, plus riche que celle du roi ? enfoncés les diamants de la couronne. Dites donc, près Salomon, voilà une porte.

SALOMON.

Chut !…

PISTOL.

Oh ! mais une vraie porte.

SALOMON.

Chut !…

PISTOL.

Sait-il cela, M. Kean ?… c’est qu’on pourrait le venir voler par là… et quoiqu’elle ait l’air de ne pas s’ouvrir, tenez, elle s’ouvre…

SALOMON.

Mais, serpent que tu es, comment donc t’y es-tu pris ?

PISTOL.

Oh ! avec la pointe de mon couteau.

SALOMON.

Si M. Kean savait ce que tu viens de faire !…

PISTOL.

Il se fâcherait ?… alors il ne faut pas le lui dire… Supposons que je n’ai rien vu : il n’y a pas de porte, quoi !… où y a-t-il une porte ?… qui est-ce qui a dit qu’il y avait une porte… C’est pas moi ! c’est vous, père Salomon. Oh ! farceur !…