Page:Dumas - Ange Pitou, 1880.djvu/480

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réfléchir pour savoir si vous devez me garder. Mais que vous ai-]e donc fait, mademoiselle Catherine ? Ah ! vous n’étiez pas comme cela autrefois.

Catherine haussa imperceptiblement les épaules.

Elle n’avait pas de bonnes raisons à donner à Pitou, et néanmoins il était évident que son insistance la fatiguait.

Aussi, rompant la conversation :

— Assez comme cela, monsieur Pitou, dit-elle ; je vais à La Ferté-Milon. — Alors, je cours seller votre cheval, mademoiselle Catherine. — Pas du tout ; restez au contraire. — Vous refusez que je vous accompagne ? — Restez, dit Catherine impérieusement.

Pitou demeura cloué à sa place, baissant la tête, en renvoyant en dedans une larme qui piquait sa paupière comme si elle eût été d’huile bouillante.

Catherine laissa Pitou où il était, sortit, et donna à un valet de ferme l’ordre de seller son cheval.

— Ah ! murmura Pitou, vous me trouvez changé, mademoiselle Catherine, mais c’est vous qui l’êtes, et bien autrement que moi.


LXI

CE QUI DÉCIDE PITOU À QUITTER LA FERME ET À RETOURNER À HARAMONT SA SEULE ET VÉRITABLE PATRIE


Cependant la mère Billot, résignée aux fonctions de première servante, avait repris son ouvrage sans affectation, sans aigreur, de bonne volonté. Le mouvement, interrompu un instant dans toute la hiérarchie agricole, recommençait à imiter l’intérieur de la ruche bourdonnante et travailleuse.

Pendant qu’on préparait le cheval de Catherine, Catherine rentra. Jeta un coup d’œil de côté sur Pitou, dont le corps demeura immobile, mais dont la tête tourna comme une girouette, suivant le mouvement de la jeune fille jusqu’à ce que la jeune fille eût disparu dans sa chambre.

— Qu’allait faire Catherine dans sa chambre ? se demanda Pitou.

Pauvre Pitou ! ce qu’elle allait faire ? Elle allait se coiffer, mettre un bonnet blanc, passer un bas plus fin.

Puis, quand ce supplément de toilette fut achevé, comme elle entendait son cheval qui piaffait sous la gouttière, elle rentra, embrassa sa mère, et partit.