Page:Dumas - Ange Pitou, 1880.djvu/523

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fayette comme commandant de la garde nationale. Vous êtes donc reconnus et agréés comme gardes nationaux par le général Lafayette et le ministre de la guerre.

Un long cri de joie et d’admiration ébranla les murs du galetas qu’habitait Pitou.

— Quant aux armes, continua notre homme, le moyen de les avoir, je l’ai. Vous allez promptement vous nommer un lieutenant et un sergent. Ces deux autorités m’accompagneront dans la démarche que j’ai à faire.

Les assistants se regardèrent incertains.

— Ton avis, Pitou ! dit Maniquet. — Cela ne me regarde pas, fit Pitou avec une certaine dignité, il faut que les élections ne soient pas influencées ; réunissez-vous hors de ma présence ; nommez-vous les deux chefs que j’ai désignés, mais nommez-les solides. Voilà tout ce que j’ai à vous dire. Allez !

Sur ce mot, prononcé royalement, Pitou congédia ses soldats, et demeura seul enveloppé dans sa grandeur ainsi qu’Agamemnon. Il s’absorba dans sa gloire, tandis que les électeurs se disputaient au dehors une bribe de la puissance militaire qui devait régir Haramont.

L’élection dura une heure. Les lieutenant et sergent furent nommés ; ce furent : le sergent, Claude Tellier ; et le lieutenant. Désiré Maniquet. Alors, on revint trouver Ange Pitou, qui les reconnut et les acclama. Puis, ce travail terminé :

— Maintenant, Messieurs, dit-il, pas un moment à perdre. — Oui, oui, apprenons l’exercice ! fit un des plus enthousiastes. — Une minute, répliqua Pitou ; avant l’exercice, ayons d’abord les fusils. — C’est trop juste, dirent les chefs. — En attendant les fusils, ne peut-on étudier avec des bâtons ? — Faisons les choses militairement, répondit Pitou, qui, voyant l’ardeur générale, ne se sentait pas assez fort pour donner des leçons d’un art auquel il ne comprenait encore rien ; des soldats qui apprennent l’exercice à feu avec des bâtons, c’est grotesque ; ne commençons pas par être ridicules ! — C’est juste, fut-il répondu : les fusils !

— Venez donc avec moi, lieutenant et sergent, dit-il à ses inférieurs ; 

vous autres, attendez noire retour. Un acquiescement respectueux fut la réponse de la troupe.

— Il nous reste six heures de jour. C’est plus qu’il n’en faut pour aller à Villers-Cotterets faire notre affaire et revenir. — En avant, marche ! cria Pitou.

L’état-major de l’armée d’Haramont se mit en route aussitôt. Mais quand Pitou relut la lettre de Billot, pour se bien persuader que