Page:Dumas - Georges, 1848.djvu/109

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drai. N’est-ce pas, Henri ? continua Sara en se retournant vers la porte, qui s’ouvrait en ce moment pour donner passage à monsieur de Malmédie et à son fils.

— Qu’y a-t-il, ma chère Sara ? demanda le jeune homme en s’approchant d’elle et en lui baisant la main.

— N’est-ce pas que lorsque nous serons mariés vous ne me contrarierez jamais, et que vous me donnerez tout ce qui me fera plaisir ?

— Peste ! dit monsieur de Malmédie, j’espère que voilà une petite femme qui fait les conditions d’avance.

— N’est-ce pas, continua Sara, que si j’aime toujours les bals, vous m’y conduirez toujours et que vous y resterez tant que je voudrai, tout au contraire de ces vilains maris qui s’en vont après la septième on huitième contredanse ? N’est-ce pas que je pourrai chanter tant que je voudrai ? N’est-ce pas que je pourrai pêcher tant que je voudrai ? N’est-ce pas que si j’ai envie d’un beau chapeau de France, vous me l’achèterez ; d’un beau châle de l’Inde, vous me l’achèterez ; d’un beau cheval anglais ou arabe, vous me l’achèterez ?

— Sans doute, dit Henri en souriant. Mais, à propos de chevaux arabes, nous en avons vu deux beaux aujourd’hui, et je suis bien aise que vous ne les ayez pas vus, vous, Sara ; car, comme ils ne sont probablement pas à vendre, si par hasard vous en aviez eu envie, je n’aurais pas pu vous les donner.

— Je les ai vus aussi, dit Sara ; n’appartiennent-ils pas à un jeune homme de vingt-cinq à vingt-six ans, à un étranger brun, avec de beaux cheveux et des yeux superbes ?

— Diable ! Sara, dit Henri, il paraît que vous avez encore plus fait attention au cavalier qu’aux chevaux ?

— C’est tout simple, Henri, le cavalier s’est approché de moi et m’a parlé, tandis que je n’ai vu les chevaux qu’à une certaine distance, et ils n’ont pas même henni.

— Comment, ce jeune fat vous a parlé, Sara ? Et à quelle occasion ? reprit Henri.

— Oui, à quelle occasion ? demanda monsieur de Malmédie.

— D’abord, dit Sara, je ne me suis pas aperçue le moins du monde de sa fatuité, et voilà mamie Henriette qui était avec moi et qui ne s’en est pas aperçue non plus ; ensuite, à quelle occasion il m’a parlé ? oh ! mon Dieu, rien de plus