Page:Dumas - Georges, 1848.djvu/183

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de ma mère. Ce soir, à dix heures, je serai au pavillon pour la recevoir.

« Georges. »

Sara regarda autour d’elle effrayée. Il lui semblait qu’en se retournant elle allait voir Georges.

En ce moment la porte s’ouvrit, et, au lieu de Georges, Sara vit paraître Henri : elle cacha la lettre de Georges dans sa poitrine.

Henri avait en général, et comme nous l’avons vu, d’assez mauvaises inspirations à l’égard de sa cousine ; cette fois il ne fut pas plus heureux que de coutume. Le moment était mal choisi pour se présenter devant Sara, toute préoccupée qu’elle était d’un autre.

— Pardon, ma chère Sara, dit Henri, si j’entre chez vous ainsi sans me faire annoncer ; mais, au point où nous en sommes, et entre gens qui dans quinze jours seront mari et femme, il me semble, quoique vous en disiez, que de pareilles libertés sont permises. D’ailleurs, je viens pour vous dire que si vous avez dehors quelques belles fleurs à qui vous teniez, vous ne feriez pas mal de les faire rentrer.

— Et pourquoi cela ? demanda Sara.

— Ne voyez-vous pas qu’il se prépare un coup de vent, et que pour les fleurs comme pour les gens, mieux vaudra cette nuit être dedans que dehors.

— Oh ! mon Dieu, s’écria Sara en songeant à Georges, y aura-t-il donc du danger ?

— Pour nous qui avons une maison solide, non, dit Henri, mais pour les pauvres diables qui demeurent dans des cases ou qui auront affaire par les chemins, oui, et j’avoue que je ne voudrais pas être à leur place.

— Vous croyez, Henri ?

— Pardieu ! si je le crois. Tenez, entendez-vous ?

— Quoi ?

— Les filaos[1] du jardin de la Compagnie.

  1. Arbres des colonies qui remplacent nos cyprès sur les tombeaux