Page:Dumas - Georges, 1848.djvu/277

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ment semblait naître à leur base et venait mourir à leur extrémité. Laïza ne s’y trompa point et ses regards s’arrêtèrent sur le buisson. Bientôt son doute se changea en certitude : à travers les branches il avait distingué deux yeux inquiets qui, après avoir parcouru tout l’horizon qu’ils pouvaient atteindre, se fixèrent sur lui ; alors Laïza renouvela le signal qu’il avait déjà fait entendre une fois : aussitôt un homme glissa comme un serpent entre les pierres disjointes, et Laïza se trouva en face d’un nègre marron.

Les deux noirs n’échangèrent que quelques paroles, puis Laïza retourna sur ses pas et rejoignit la petite troupe, qui fit à son tour, guidée par lui, le même chemin qu’il venait de faire, et qui arriva bientôt à l’endroit où il avait trouvé le nègre.

Une ouverture produite par le dérangement de quelques pierres avait amené un passage dans la muraille : ce passage donnait entrée dans une grotte immense.

Les fugitifs passèrent deux à deux à travers ce défilé facile à défendre. Derrière le dernier, le nègre remit les pierres dans le même ordre où elles étaient auparavant, de manière à ce qu’on ne vît aucune trace du passage ; puis, se cramponnant à son tour aux broussailles et aux aspérités des pierres, il escalada la muraille et disparut dans la forêt.

Deux cents hommes venaient de s’engloutir dans les entrailles de la terre sans que l’œil le plus exercé pût dire par quel endroit ils avaient passé.

Soit par un de ces hasards naturels qui se rencontrent parfois sans que la main de l’homme ait aidé en rien aux effets qu’ils produisent, soit, au contraire, par un long et prévoyant travail des nègres marrons, le sommet de la montagne, dans les flancs de laquelle la petite troupe venait de disparaître, était défendu d’un côté par une roche perpendiculaire pareille à un rempart, et d’un autre côté par cette haie gigantesque composée de troncs d’arbres, de liane et de fougère, qui avait d’abord arrêté la marche de nos fugitifs ; la seule entrée véritablement praticable était donc celle que nom avons décrite, et, comme nous l’avons dit, cette entrée disparaissait entièrement derrière les pierres qui l’obs-