Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 1.djvu/114

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— Il n’y a point de lumière dans sa chambre.

— Avez-vous besoin de lumière pour y voir ?

— Non, si vous l’ordonnez.

— Voyez ! je le veux.

— Ah ! je la vois !

— Eh bien ?

— Elle est à moitié vêtue ; elle pousse doucement la porte de sa chambre ; elle descend l’escalier.

— Bien. Où va-t-elle ?

— Elle s’arrête à la porte de la cour ; elle se cache derrière cette porte ; elle guette, elle attend.

Balsamo sourit.

— Est-ce vous, dit-il, qu’elle guette ou qu’elle attend ?

— Non

— Eh bien ! voilà le principal. Quand une jeune fille est libre de son père et de sa femme de chambre, elle n’a plus rien à craindre, à moins que…

— Non, dit-elle.

— Ah ! ah ! vous répondez à ma pensée ?

— Je la vois.

— Ainsi, vous n’aimez personne ?

— Moi ? dit dédaigneusement la jeune fille…

— Eh ! sans doute ; vous pourriez aimer quelqu’un, ce me semble. On ne sort pas du couvent pour vivre dans la réclusion, et l’on donne la liberté au cœur en même temps qu’au corps ?

Andrée secoua la tête.

— Mon cœur est libre, dit-elle tristement.

Et une telle expression de candeur et de modestie virginale embellit ses traits, que Balsamo radieux murmura :

— Un lis ! une pupille ! une voyante !

Et il joignit les mains, en signe de joie et de remerciement ; puis revenant à Andrée :

— Mais si vous n’aimez pas, continua-t-il, vous êtes aimée sans doute ?

— Je ne sais pas, dit la jeune fille avec douceur.

— Comment ! vous ne savez pas ! répondit Balsamo assez