Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 1.djvu/116

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— Mais il écoutera.

— Sans doute, il approche son oreille de la porte, il écoute.

— Il vous gêne alors ?

— Oui, parce qu’il peut entendre ce que je dis.

— Et il est homme à en abuser, même envers vous, qu’il aime ?

— Oui, dans un moment de colère ou de jalousie ; oh ! oui, dans un de ces moments-là, il est capable de tout.

— Alors, débarrassons-nous-en, dit Balsamo.

Et il marcha bruyamment vers la porte.

Sans doute l’heure de la bravoure n’était pas encore venue pour Gilbert, car, au bruit des pas de Balsamo, craignant d’être surpris, il s’élança à cheval sur la rampe et se laissa glisser jusqu’à terre.

Andrée poussa un petit cri d’épouvante.

— Cessez de regarder de ce côté, dit Balsamo en revenant vers Andrée. Ce sont choses de peu d’importance que les amours vulgaires. Parlez-moi du baron de Taverney, voulez-vous ?

— Je veux tout ce que vous voulez, dit Andrée avec un soupir.

— Il est donc bien pauvre, le baron ?

— Très pauvre.

— Trop pauvre pour vous donner aucune distraction ?

— Aucune.

— Alors, vous vous ennuyez, dans ce château ?

— Mortellement.

— Vous avez de l’ambition, peut-être ?

— Non.

— Vous aimez votre père ?

— Oui, dit la jeune fille presque avec hésitation.

— Cependant il me sembla, hier soir, qu’il y avait un nuage sur cet amour filial ? reprit Balsamo en souriant.

— Je lui en veux d’avoir follement dépensé toute la fortune de ma mère, de sorte que le pauvre Maison-Rouge languit en garnison et ne peut plus porter dignement le nom de notre famille.

— Qu’est-ce que Maison-Rouge ?