parlez musique comme vous parliez botanique, et que vous avez failli me parler amour.
— Oh ! monsieur, dit Gilbert rougissant, ne vous raillez pas de moi.
— Au contraire, mon enfant, vous m’étonnez, La musique est un art qui ne vient qu’après les autres études, et vous m’avez dit n’avoir reçu aucune éducation, vous m’avez dit n’avoir rien appris.
— C’est la vérité, monsieur.
— Ce n’est cependant pas vous qui avez imaginé tout seul que ce point noir sur la dernière ligne était un fa ?
— Monsieur, dit Gilbert baissant la tête et la voix, dans la maison que j’habitais, il y avait une… une jeune personne qui jouait du clavecin.
— Ah ! oui, celle qui faisait de la botanique ? fit Jacques.
— Justement, monsieur ; elle en jouait même fort bien.
— Vraiment ?
— Oui, et moi, j’adore la musique.
— Tout ceci n’est point une raison de connaître les notes.
— Monsieur, il y a dans Rousseau qu’incomplet est l’homme qui jouit de l’effet sans remonter à la cause.
— Oui ; mais il y a aussi, dit Jacques, que l’homme en se complétant par cette recherche, perd sa joie, sa naïveté et son instinct.
— Qu’importe, dit Gilbert, s’il trouve dans l’étude une jouissance égale à celles qu’il peut perdre.
Jacques surpris se retourna.
— Allons, dit-il, vous êtes non seulement botaniste et musicien, mais vous êtes encore logicien.
— Hélas ! monsieur, je ne suis malheureusement ni botaniste, ni musicien, ni logicien ; je sais distinguer une note d’une autre note, un signe d’un autre signe, voilà tout.
— Vous solfiez alors ?
— Moi ? pas le moins du monde.
— Eh bien ! n’importe, voulez-vous essayer de copier ? Voici du papier tout réglé, mais prenez garde de le gaspiller,