Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 5.djvu/46

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par tradition de l’antiquité, mais dont il n’avait pour preuve que des exemples.

Cependant, bientôt cette perpétuelle flamme, bientôt cette soif de caresses le rassuraient.

— Si Lorenza avait dissimulé, se disait-il, si elle avait l’intention de me fuir, elle chercherait les occasions de m’éloigner, elle trouverait des motifs de solitude ; mais loin de cela, ce sont toujours ses bras qui m’enferment comme une chaîne inextricable ; c’est toujours son regard brûlant qui me dit : « Ne t’en va pas ! » c’est toujours sa douce voix qui me dit : « Reste. »

Alors Balsamo se reprenait à sa confiance en lui-même et dans la science.

Pourquoi, en effet, ce secret magique, et auquel il devait tout son pouvoir, serait-il devenu tout à coup, sans transition, une chimère, bonne à jeter au vent comme un souvenir évanoui, comme la fumée d’un feu éteint ? Jamais, relativement à lui, Lorenza n’avait été plus lucide, plus voyante ; toutes les pensées qui se formulaient dans son esprit, toutes les impressions qui faisaient tressaillir son cœur, Lorenza les reproduisait à l’instant même.

Restait à savoir si cette lucidité n’était pas de la sympathie ; si en dehors de lui et de la jeune femme, de l’autre côté du cercle tracé par leur amour, et que leur amour inondait de lumière, restait à savoir si ces yeux de l’âme, si clairvoyants avant la chute de cette nouvelle Ève, pourraient encore percer l’obscurité.

Balsamo n’osait faire d’épreuve décisive, il espérait toujours, et l’espérance faisait une couronne étoilée à son bonheur.

Parfois Lorenza lui disait avec une douce mélancolie :

— Acharat, tu penses à une autre femme que moi, à une femme du Nord, aux cheveux blonds, aux yeux bleus ; Acharat, ah ! Acharat, cette femme marche toujours à côté de moi dans ta pensée.

Alors Balsamo regardait tendrement Lorenza.

— Tu vois cela en moi ? disait-il.

— Oh ! oui, aussi clairement que je verrais dans un miroir.

— Alors, tu sais si c’est par amour que je pense à cette