Page:Dumas - La Femme au collier de velours, 1861.djvu/170

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vait être comparé au soupir poussé par Hoffmann au commencement du dialogue que nous venons de rapporter.

— Ah ! ah ! fit Hoffmann, vous vous chargiez de donner des renseignemens, d’indiquer l’adresse, de remettre les billets ; vous en chargez-vous toujours ?

— Hélas ! monsieur, les renseignemens que je vous donnerais vous seraient inutiles maintenant ; personne ne sait plus l’adresse d’Arsène, et le billet que vous me donneriez pour elle serait perdu. Si vous voulez pour une autre ? madame Vestris, mademoiselle Bigottini, mademoiselle…

— Merci, ma bonne femme, merci ; je ne désirais rien savoir que sur mademoiselle Arsène. Puis, tirant un petit écu de sa poche :

— Tenez, dit Hoffmann, voilà pour la peine que vous avez prise de m’éveiller.

Et, prenant congé de la vieille, il reprit d’un pas lent le boulevard, avec l’intention de suivre le même chemin qu’il avait suivi la surveille, l’instinct qui l’avait guidé pour venir n’existait plus.

Seulement, ses impressions étaient bien différentes, et sa marche se ressentait de la différence de ces impressions.

L’autre soir, sa marche était celle d’un homme qui a vu passer l’Espérance et qui court après elle, sans réfléchir que Dieu lui a donné ses longues ailes d’azur pour que les hommes ne l’atteignent jamais. Il avait la bouche ouverte et haletante, le front haut, les bras étendus ; cette fois, au contraire, il marchait lentement, comme l’homme qui, après l’avoir poursuivie inutilement, vient de la perdre de vue ; sa bouche était serrée, son front abattu, ses bras tombans. L’autre fois il avait mis cinq minutes à