Page:Dumas - La Femme au collier de velours, 1861.djvu/192

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— Non ; Antonia, fit Hoffmann en tressaillant, Antonia, c’est autre chose, je l’aime !

— Diable ! la distinction est subtile ; conte-moi cela. Citoyen officieux, de la bière et des verres !

Les deux jeunes gens bourrèrent leurs pipes, et s’assirent aux deux côtés de la table la plus enfoncée dans l’angle du café.

Là, Hoffmann raconta à Werner tout ce qui lui était arrivé depuis le jour où il avait été à l’Opéra et où il avait vu danser Arsène, jusqu’au moment où il avait été poussé par les deux femmes hors du boudoir.

— Eh bien ! fit Werner quand Hoffmann eut fini.

— Eh bien ! répéta celui-ci, tout étonné que son ami ne fût pas aussi abattu que lui.

— Je demande, reprit Werner, ce qu’il y a de désespérant dans tout cela.

— Il y a, mon cher, que maintenant que je sais qu’on ne peut avoir cette femme qu’à prix d’argent, il y a que j’ai perdu tout espoir.

— Et pourquoi as-tu perdu tout espoir ?

— Parce que je n’aurai jamais cinq cents louis à jeter à ses pieds.

— Et pourquoi ne les aurais-tu pas ? je les ai bien eus, moi, cinq cents louis, mille louis, deux mille louis.

— Et où veux-tu que je les prenne ? bon Dieu ! s’écria Hoffmann.

— Mais dans l’Eldorado dont je t’ai parlé, à la source du Pactole, mon cher, au jeu.

— Au jeu ! fit Hoffmann en tressaillant. Mais tu sais bien que j’ai juré à Antonia de ne plus jouer.