Page:Dumas - La Femme au collier de velours, 1861.djvu/23

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Pour mieux voir, il approcha le microscope de la fenêtre, et vida dans la cage le contenu de la petite boîte.

Le cadavre était toujours immobile et couché sur le sable ; seulement le temps, qui a tant de prise sur les colosses, semblait avoir oublié l’infiniment petit.

Nodier regardait donc son éphémère, quand tout à coup une goutte de pluie, chassée par le vent, tombe dans la cage du microscope et humecte la pincée de sable.

Alors, au contact de cette fraîcheur vivifiante, il semble à Nodier que son taratantaleo se ranime, qu’il remue une antenne, puis l’autre ; qu’il fait tourner une de ses roues, qu’il fait tourner ses deux roues, qu’il reprend son centre de gravité, que ses mouvemens se régularisent, qu’il vit enfin.

Le miracle de la résurrection vient de s’accomplir, non pas au bout de trois jours, mais au bout d’un an.

Dix fois Nodier renouvela la même épreuve, dix fois le sable sécha et le taratantaleo mourut ; dix fois le sable fut humecté et dix fois le taratantaleo ressuscita.

Ce n’était pas un éphémère que Nodier avait découvert, c’était un immortel. Selon toute probabilité, son taratantaleo avait vu le déluge et devait assister au jugement dernier.

Malheureusement, un jour que Nodier, pour la vingtième fois peut-être, s’apprêtait à renouveler son expérience, un coup de vent emporta le sable séché, et, avec le sable, le cadavre du phénoménal taratantaleo.

Nodier reprit bien des pincées de sable mouillé sur sa gouttière et ailleurs, mais ce fut inutilement, jamais il ne retrouva l’équivalent de ce qu’il avait perdu : le taratan-