Page:Dumas - La Reine Margot (1886), tome 2.djvu/224

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sir, je l’avoue, à les entendre discuter sur ma maladie. Nourrice, donne-moi à boire.

La nourrice apporta à Charles une tasse de sa potion ordinaire.

— Et que vous font-ils prendre, mon fils ?

— Oh ! Madame, qui connaît quelque chose à leurs préparations ? répondit le roi en avalant vivement le breuvage.

— Ce qu’il faudrait à mon frère, dit François, ce serait de pouvoir se lever et prendre le beau soleil ; la chasse, qu’il aime tant, lui ferait grand bien.

— Oui, dit Charles avec un sourire dont il fut impossible au duc de deviner l’expression, cependant la dernière m’a fait grand mal.

Charles avait dit ces mots d’une façon si étrange que la conversation à laquelle les assistants ne s’étaient pas un instant mêlés, en resta là. Puis il fit un petit signe de tête. Les courtisans comprirent que la réception était achevée, et se retirèrent les uns après les autres.

D’Alençon fit un mouvement pour s’approcher de son frère, mais un sentiment intérieur l’arrêta. Il salua, et sortit.

Marguerite se jeta sur la main décharnée que son frère lui tendait, la serra et la baisa, et sortit à son tour.

— Bonne Margot ! murmura Charles.

Catherine seule resta, conservant sa place au chevet du lit. Charles, en se trouvant en tête-à-tête avec elle, se recula vers la ruelle avec le même sentiment de terreur qui fait qu’on recule devant un serpent.

C’est que Charles, instruit par les aveux de René, puis peut-être mieux encore par le silence et la méditation, n’avait plus même le bonheur de douter.

Il savait parfaitement à qui et à quoi attribuer sa mort.

Aussi, lorsque Catherine se rapprocha du lit et allongea vers son fils une main froide comme son regard, celui-ci frissonna et eut peur.

— Vous demeurez, Madame ? lui dit-il.

— Oui, mon fils, répondit Catherine, j’ai à vous entretenir de choses importantes.

— Parlez, Madame, dit Charles en se reculant encore.

— Sire, dit la reine, je vous ai entendu affirmer tout à l’heure que vos médecins étaient de grands docteurs…

— Et je l’affirme encore, Madame.