Page:Dumas - La Villa Palmieri.djvu/252

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douze pièces de canon ; mais, les unes après les autres, ces pièces attelées quittaient leur position et se mettaient en retraite.

Une dernière, voyant un groupe important, fit feu en se retirant.

Le boulet porta en plein dans le groupe, et Zaionczek et son cheval roulèrent aux pieds de l’empereur.

On s’élança vers eux : le cheval était tué ; Zaionczek avait le genou brisé.

C’était la première fois qu’il était blessé depuis quatorze ans !

L’empereur fit appeler Larrey, ne voulant confier la vie de son vieux compagnon qu’à la main exercée de l’illustre chirurgien.

Là, comme à Rivoli, comme aux Pyramides, comme à Marengo, comme à Austerlitz, comme à Friedlaud, Larrey, toujours prêt, accourut.

Zaionczek et lui étaient de vieux amis.

Larrey examina la blessure et jugea l’amputation indispensable.

Larrey n’était pas l’homme des préparations ingénieuses, il allait droit au but ; sur le champ de bataille le chirurgien n’a pas le temps de faire des phrases : des mourans l’attendent pour ne pas mourir.

Il tendit la main à Zaionczek.

— Courage, mon vieux compagnon, lui dit-il, et nous allions vous débarrasser de cette jambe, qui, sans cela, pourrait bien se débarrasser de vous.

— Il n’y a pas moyen de me la conserver ? demanda le blessé.

— Regardez vous-même, et jugez.

— Le fait est qu’elle est en mauvais état.

— Mais nous allons faire la chose en ami ; pour tout ce monde c’est trois minutes, pour vous c’en sera deux.

Et Larrey commença à retourner les paremens de son uniforme.

— Un instant, un instant, dit Zaionczek en apercevant son valet de chambre qui accourait.