Page:Dumas - Le Capitaine Aréna.djvu/287

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petit roulement de lèvres, pareil à celui dont le chasseur se sert pour faire envoler les perdreaux, et nous partîmes comme le vent.

Au bout d’un instant, Milord manifesta de l’inquiétude : il se passait immédiatement au-dessous de lui quelque chose qui ne lui semblait pas naturel. Bientôt il fit entendre un grognement sourd, suivi d’un froncement de lèvres qui découvrait ses deux mâchoires depuis les premières canines jusqu’aux dernières molaires : c’était un signe auquel il n’y avait pas à se tromper ; aussi, presque aussitôt, Milord fit une volte. Mais, à notre grand étonnement, il tourna sur lui-même comme sur un pivot : sa queue était passée à travers la natte qui formait le plancher du calessino, et une force supérieure l’empêchait de rentrer en possession de cette partie de sa personne, de laquelle, d’ordinaire, il était fort jaloux.

Des éclats de rire, qui suivirent immédiatement le mouvement infructueux de Milord, nous apprirent à qui il avait affaire. Nous avions négligé de visiter le filet qui pendait au-dessous de la voiture, et, pendant qu’elle attendait à la porte, il s’était rempli de son chargement ordinaire.

Jadin était furieux de l’humiliation que venait d’éprouver Milord ; mais je le calmai avec les paroles du Christ : Laissez venir les enfans jusqu’à moi. Seulement, on s’arrêta et on fit des conditions avec les usurpateurs ; il fut convenu qu’on les laisserait dans leur filet, et qu’ils y demeuraient parfaitement inoffensifs à l’endroit de Milord. Le traité conclu, nous repartîmes au galop.

Nous n’avions pas fait cent pas, qu’il nous sembla entendre notre cocher dialoguer avec un autre qu’avec son cheval ; nous nous retournâmes, et nous vîmes une seconde tête au-dessus de son épaule : c’était celle d’un marinier de Pouzzoles, qui avait saisi le moment où nous nous étions arrêtés pour profiter de l’occasion qui se présentait, de revenir jusqu’à Naples avec nous. Notre premier mouvement fut de trouver le moyen un peu sans gêne, et de le prier de descendre ; mais avant que nous eussions ouvert la bouche, il avait, d’un ton si câlin, souhaité le bonjour à Nos Excellen-