Page:Dumas - Le Capitaine Pamphile, 1875.djvu/135

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quillité et une lenteur qui prouvaient une conviction profonde dans l’étendue du nuage vivant qui passait sur sa tête ; enfin, il le porta à son épaule, et, sans se donner la peine de viser, il lâcha le coup ; à l’instant même, une espèce d’ouverture pareille à celle d’un puits laissa passer un rayon de jour qui disparut aussitôt ; une cinquantaine de pigeons, compris dans la circonférence embrassée par le plomb, tomba comme une pluie dans la barque et autour de la barque ; les Indiens les ramassèrent jusqu’au dernier, au grand étonnement du capitaine Pamphile, qui ne voyait aucune raison de se donner tant de mal, tandis qu’avec un ou deux coups de fusil encore, et sans prendre la peine de s’écarter à droite ou à gauche, le canot en pouvait recueillir un nombre suffisant à l’approvisionnement de l’équipage ; mais, en se retournant, il vit que le chef s’était recouché, avait posé son arme à côté de lui et repris son calumet.

— Le Serpent-Noir a-t-il déjà fini sa chasse ? dit le capitaine Pamphile.

— Le Serpent-Noir a tué d’un seul coup tout ce qu’il lui fallait de pigeons pour son souper et celui de sa suite ; un Huron n’est point un homme blanc pour détruire inutilement les créatures du Grand Esprit.

— Ah ! ah ! fit le capitaine Pamphile se parlant à lui-même, ceci n’est pas mal raisonné pour un sauvage ; mais je n’aurais pas été fâché de voir faire encore trois ou quatre trouées dans ce linceul emplumé qui est étendu sur notre tête, ne fût-ce que pour être sûr que le soleil est encore à sa place.