Page:Dumas - Le Capitaine Pamphile, 1875.djvu/142

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avait reconnu le cri nocturne et affamé des loups, si communs dans les forêts du Canada, qu’ils descendent parfois, lorsque la nourriture leur manque, jusque dans les rues de Portland et de Boston.

Il n’avait pas encore eu le temps de prendre une résolution, lorsque de nouveaux hurlements retentirent plus rapprochés ; il n’y avait pas un instant à perdre : le capitaine Pamphile, dont l’éducation gymnastique avait été soigneusement développée, comptait parmi ses talents les plus distingués celui de monter aux arbres comme un écureuil ; il avisa donc un chêne d’une grosseur tout à fait raisonnable, l’empoigna corps à corps, comme s’il eût voulu le déraciner, et atteignit les premières branches au moment où les cris qui lui avaient donné l’éveil retentissaient pour la troisième fois, à cinquante pas à peine de lui ; le capitaine Pamphile ne s’était pas trompé, une bande de loups dispersés dans la circonférence d’une lieue à peu près l’avaient éventé, et revenaient au grand galop vers le centre où ils espéraient trouver à souper. — Ils arrivèrent trop tard : le capitaine Pamphile était perché.

Cependant les loups ne se tinrent pas pour battus ; rien n’est entêté comme un estomac vide ; ils se rassemblèrent au pied de l’arbre et commencèrent à se plaindre si lamentablement, que le capitaine Pamphile, tout brave qu’il était, ne fut pas, en entendant ce cri triste et prolongé, à l’abri de toute terreur, quoique, de fait, il fût à l’abri de tout danger.

La nuit était sombre, mais pas si sombre cependant qu’il n’aperçût dans l’obscurité, pareils aux flots d’une