Page:Dumas - Le Capitaine Pamphile, 1875.djvu/147

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versaire, et, selon l’habitude des reptiles constricteurs, il en digérait une moitié, tandis que l’autre exposée encore à l’air, attendait son tour d’être engloutie.

Le capitaine Pamphile resta un instant immobile et les regards fixés sur le spectacle qu’il avait à ses pieds ; plusieurs fois, en Amérique et dans l’Inde, il avait vu des serpents semblables, mais jamais dans des circonstances aussi propres à l’impressionner : aussi, quoiqu’il sût parfaitement que, dans la position où il était, le reptile était incapable de lui faire aucun mal, il avisa au moyen de descendre autrement qu’en se laissant glisser le long du tronc ; en conséquence, il commença par dénouer la corde qui l’attachait ; puis, avançant à reculons sur la branche, jusqu’à ce qu’il la sentit plier, il se confia à sa flexibilité, et alors, la courbant sous son poids, il se suspendit par les deux mains et se trouva si près du sol, qu’il pensa qu’il pouvait sans inconvénient abandonner son soutien. L’événement seconda ses espérances : le capitaine lâcha sa branche et se trouva à terre sans accident.

Il s’éloigna aussitôt, non sans regarder plus d’une fois derrière lui ; il marcha au-devant du soleil. Aucune route n’était tracée dans la forêt ; mais avec l’instinct du chasseur et la science du marin, il n’eut qu’à jeter un coup d’œil sur la terre et le ciel pour s’orienter à l’instant ; il s’avança donc sans hésitation, comme s’il eût été familier avec ces immenses solitudes ; plus il pénétrait dans la forêt, plus elle prenait un caractère grandiose et sauvage. Peu à peu la voûte feuillée s’épaissit au point que le soleil cessa d’y pénétrer ; les arbres pous-