Page:Dumas - Le Capitaine Pamphile, 1875.djvu/169

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Le capitaine Pamphile avait marché comme l’ogre du petit Poucet.

Il se mit en quête d’une auberge ; mais il ne trouva pas un seul hôtelier qui voulût loger à pareille heure un ours et un sauvage ; il commençait donc à être plus embarrassé au milieu de la capitale de la Pensylvanie qu’il ne l’avait été au centre des forêts du fleuve Saint-Laurent, lorsqu’il vit une taverne chaudement éclairée, et d’où sortait un tel mélange de bruits de verres, d’éclats de rire et d’imprécations, qu’il était évident qu’il y avait là quelque équipage qui venait de toucher sa paye. L’espoir revint aussitôt au capitaine : ou il avait oublié ce que c’est qu’un marin, ou il y avait là pour lui du vin, de l’argent et un lit, trois choses de première nécessité dans sa situation ; il s’approchait donc avec confiance, lorsque tout à coup il s’arrêta comme s’il était cloué à sa place.

Au milieu du tapage, des cris et des jurements, il avait cru reconnaître un air provençal chanté par un des buveurs : il demeura donc le cou tendu et l’oreille ouverte, doutant encore, tant la chose lui paraissait invraisemblable ; mais bientôt, à un refrain repris en chœur, il ne lui resta plus aucune incertitude : il avait là des compatriotes. Il fit alors et de nouveau quelques pas en avant et s’arrêta encore ; mais, cette fois, sa figure prit une expression d’étonnement qui tenait de la stupidité : non-seulement ces hommes étaient des compatriotes, non-seulement cette chanson, c’était une chanson provençale, mais encore celui qui la chantait, c’était Policar ! L’équi-