Page:Dumas - Le Capitaine Pamphile, 1875.djvu/55

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» — Ah ! fit le capitaine Pamphile, lorsqu’il vit les provisions en bonne route vers son bâtiment, je crois que j’ai bien gagné que jé déjeunasse.

» Et, comme c’était une vérité que lui seul avait besoin de reconnaître pour que toutes ses conséquences en fussent déduites à l’instant même, il étendit par terre sa peau de tigre, s’assit dessus, tira de sa poche gauche une gourde de rhum qu’il posa à sa droite, de sa poche droite une superbe goyave qu’il posa à sa gauche, et de sa gibecière un morceau de biscuit qu’il plaça entre ses jambes ; puis il se mit à charger sa pipe pour n’avoir rien de fatigant à faire après son repas.

» Vous avez vu parfois Debureau, faire avec grand soin les préparatifs de son déjeuner pour que Arlequin le mange ? vous vous rappelez sa tête, n’est-ce pas, lorsqu’en se tournant, il voit son verre vide et sa pomme chippée ? — Oui. — Eh bien, regardez le capitaine Pamphile, qui trouve sa gourde de rhum renversée, et sa goyave disparue.

» Le capitaine Pamphile, à qui le privilège du ministre de l’intérieur n’a point interdit la parole, fit entendre le plus merveilleux « Tron dé Diou ! » qui soit sorti d’une bouche provençale depuis la fondation de Marseille ; mais, comme il était moins crédule que Debureau, qu’il avait lu les philosophes anciens et modernes, et qu’il avait appris, dans Diogène de Laerce et dans M. de Voltaire, qu’il n’est point d’effet sans cause, il se mit immédiatement à chercher la cause dont l’effet lui était si préjudiciable, mais cela sans faire semblant de rien, sans bouger de la