Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 1.djvu/137

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

élevé, ambitieux surtout ; et, pardieu, vous connaissez de nom son père.

— Son père ?

— Oui, Noirtier.

— Noirtier le girondin ? Noirtier le sénateur ?

— Oui, justement.

— Et Votre Majesté a employé le fils d’un pareil homme ?

— Blacas, mon ami, vous n’y entendez rien ; je vous ai dit que Villefort était ambitieux : pour arriver, Villefort sacrifiera tout, même son père.

— Alors, sire, je dois donc le faire entrer ?

— À l’instant même, duc. Où est-il ?

— Il doit m’attendre en bas dans ma voiture.

— Allez me le chercher.

— J’y cours.

Le duc sortit avec la vivacité d’un jeune homme ; l’ardeur de son royalisme sincère lui donnait vingt ans.

Louis XVIII resta seul, reportant les yeux sur son Horace entr’ouvert et murmurant :

Justum et tenacem propositi virum.


M. de Blacas remonta avec la même rapidité qu’il était descendu ; mais dans l’antichambre il fut forcé d’invoquer l’autorité du roi. L’habit poudreux de Villefort, son costume, où rien n’était conforme à la tenue de cour, avait excité la susceptibilité de M. de Brézé, qui fut tout étonné de trouver dans ce jeune homme la prétention de paraître ainsi vêtu devant le roi. Mais le duc leva toutes les difficultés avec un seul mot : ordre de Sa Majesté ; et malgré les observations que continua de faire le maître des cérémonies, pour l’honneur du principe, Villefort fut introduit.