Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 1.djvu/290

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— C’est qu’il est encore lourd, pour un vieillard si maigre ! dit l’un d’eux en le soulevant par la tête.

— On dit que chaque année ajoute une demi-livre au poids des os, dit l’autre en le prenant par les pieds.

— As-tu fait ton nœud ? demanda le premier.

— Je serais bien bête de nous charger d’un poids inutile, dit le second, je le ferai là-bas.

— Tu as raison ; partons alors.

— Pourquoi ce nœud ? se demanda Dantès.

On transporta le prétendu mort du lit sur la civière. Edmond se raidissait pour mieux jouer son rôle de trépassé. On le posa sur la civière ; et le cortège, éclairé par l’homme au falot, qui marchait devant, monta l’escalier.

Tout à coup, l’air frais et âpre de la nuit l’inonda. Dantès reconnut le mistral. Ce fut une sensation subite, pleine à la fois de délices et d’angoisses.

Les porteurs firent une vingtaine de pas, puis ils s’arrêtèrent et déposèrent la civière sur le sol.

Un des porteurs s’éloigna, et Dantès entendit ses souliers retentir sur les dalles.

— Où suis-je donc ? se demanda-t-il.

— Sais-tu qu’il n’est pas léger du tout ! dit celui qui était resté près de Dantès en s’asseyant sur le bord de la civière.

Le premier sentiment de Dantès avait été de s’échapper, heureusement il se retint.

— Éclaire-moi donc, animal, dit celui des deux porteurs qui s’était éloigné, ou je ne trouverai jamais ce que je cherche.

L’homme au falot obéit à l’injonction, quoique, comme on l’a vu, elle fût faite en termes peu convenables.

— Que cherche-t-il donc ? se demanda Dantès. Une bêche sans doute.