Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 1.djvu/66

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ouvrir des yeux hagards, se lever comme par un mouvement convulsif, et retomber assis sur l’appui de cette croisée, presque au même instant un bruit sourd retentit dans l’escalier ; le retentissement d’un pas pesant, une rumeur confuse de voix mêlées à un cliquetis d’armes couvrirent les exclamations des convives, si bruyantes qu’elles fussent, et attirèrent l’attention générale, qui se manifesta à l’instant même par un silence inquiet.

Le bruit s’approcha : trois coups retentirent dans le panneau de la porte ; chacun regarda son voisin d’un air étonné.

— Au nom de la loi ! cria une voix vibrante, à laquelle aucune voix ne répondit.

Aussitôt la porte s’ouvrit, et un commissaire, ceint de son écharpe, entra dans la salle, suivi de quatre soldats armés, conduits par un caporal.

L’inquiétude fit place à la terreur.

— Qu’y a-t-il ? demanda l’armateur en s’avançant au-devant du commissaire, qu’il connaissait ; bien certainement, Monsieur, il y a méprise.

— S’il y a méprise, monsieur Morrel, répondit le commissaire, croyez que la méprise sera promptement réparée ; en attendant, je suis porteur d’un mandat d’arrêt ; et quoique ce soit avec regret que je remplis ma mission, il ne faut pas moins que je la remplisse : lequel de vous, Messieurs, est Edmond Dantès ?

Tous les regards se tournèrent vers le jeune homme, qui, fort ému mais conservant sa dignité, fit un pas en avant et dit :

— C’est moi, Monsieur, que me voulez-vous ?

— Edmond Dantès, reprit le commissaire, au nom de la loi, je vous arrête !