Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 1.djvu/72

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Ils partirent : Fernand, redevenu l’appui de la jeune fille, prit Mercédès par la main et la ramena aux Catalans. Les amis de Dantès ramenèrent, de leur côté, aux allées de Meillan ce vieillard presque évanoui.

Bientôt cette rumeur, que Dantès venait d’être arrêté comme agent bonapartiste, se répandit par toute la ville.

— Eussiez-vous cru cela, mon cher Danglars ? dit M. Morrel en rejoignant son agent comptable et Caderousse, car il regagnait lui-même la ville en toute hâte pour avoir quelque nouvelle directe d’Edmond par le substitut du procureur du roi, M. de Villefort, qu’il connaissait un peu ; auriez-vous cru cela ?

— Dame, Monsieur ! répondit Danglars, je vous avais dit que Dantès, sans aucun motif, avait relâché à l’île d’Elbe, et cette relâche, vous le savez, m’avait paru suspecte.

— Mais aviez-vous fait part de vos soupçons à d’autres qu’à moi ?

— Je m’en serais bien gardé, Monsieur, ajouta tout bas Danglars ; vous savez bien qu’à cause de votre oncle, M. Policar Morrel, qui a servi sous l’autre et qui ne cache pas sa pensée, on vous soupçonne de regretter Napoléon ; j’aurais eu peur de faire tort à Edmond et ensuite à vous ; il y a de ces choses qu’il est du devoir d’un subordonné de dire à son armateur et de cacher sévèrement aux autres.

— Bien, Danglars ! bien ! dit l’armateur, vous êtes un brave garçon ; aussi j’avais d’avance pensé à vous, dans le cas où ce pauvre Dantès fût devenu le capitaine du Pharaon.

— Comment cela, Monsieur ?

— Oui, j’avais d’avance demandé à Dantès ce qu’il pensait de vous, et s’il aurait quelque répugnance à vous