Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 2.djvu/294

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

d’être le porteur de son épître amoureuse. Cette probabilité se changea en certitude quand Franz revit le même bouquet remarquable par un cercle de camélias blancs, entre les mains d’une charmante paillassine habillée de satin rose.

Aussi le soir ce n’était plus de la joie, c’était du délire. Albert ne doutait pas que la belle inconnue ne lui répondit par la même voie. Franz alla au-devant de ses désirs en lui disant que tout ce bruit le fatiguait, et qu’il était décidé à employer la journée du lendemain à revoir son album et à prendre des notes.

Au reste, Albert ne s’était pas trompé dans ses prévisions : le lendemain au soir Franz le vit entrer d’un seul bond dans sa chambre, secouant machinalement un carré de papier qu’il tenait par un de ses angles.

— Eh bien ! dit-il, m’étais-je trompé ?

— Elle a répondu ! s’écria Franz.

— Lisez.

Ce mot fut prononcé avec une intonation impossible à rendre. Franz prit le billet et lut :

« Mardi soir, à sept heures, descendez de votre voiture en face de la via dei Pontefici, et suivez la paysanne romaine qui vous arrachera votre moccoletto. Lorsque vous arriverez sur la première marche de l’église de San-Giacomo, ayez soin, pour qu’elle puisse vous reconnaître, de nouer un ruban rose sur l’épaule de votre costume de paillasse.

« D’ici là vous ne me verrez plus

« Constance et discrétion. »

— Eh bien ! dit-il à Franz, lorsque celui-ci eu terminé cette lecture, que pensez-vous de cela, cher ami ?

— Mais je pense, répondit Franz, que la chose prend tout le caractère d’une aventure fort agréable.