Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 2.djvu/57

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était un prêtre vêtu de noir et coiffé d’un chapeau à trois cornes, malgré la chaleur dévorante du soleil alors à son midi ; ils n’allaient tous deux qu’un trot fort raisonnable.

Arrivé devant la porte, le groupe s’arrêta : il eut été difficile de décider si ce fut le cheval qui arrêta l’homme ou l’homme qui arrêta le cheval ; mais en tout cas le cavalier mit pied à terre, et, tirant l’animal par la bride, il alla l’attacher au tourniquet d’un contrevent délabré qui ne tenait plus qu’à un gond ; puis, s’avançant vers la porte en essuyant d’un mouchoir de coton rouge son front ruisselant de sueur, le prêtre frappa trois coups sur le seuil du bout ferré de la canne qu’il tenait à la main.

Aussitôt un grand chien noir se leva et fit quelques pas en aboyant et en montrant ses dents blanches et aiguës ; double démonstration hostile qui prouvait le peu d’habitude qu’il avait de la société.

Aussitôt un pas lourd ébranla l’escalier de bois rampant le long de la muraille, et que descendait, en se courbant et à reculons, l’hôte du pauvre logis à la porte duquel se tenait le prêtre.

— Me voilà ! disait Caderousse tout étonné, me voilà ! veux-tu te taire, Margotin ! N’ayez pas peur, Monsieur, il aboie, mais il ne mord pas. Vous désirez du vin, n’est-ce pas ? car il fait une polissonne de chaleur… Ah ! pardon, interrompit Caderousse en voyant à quelle sorte de voyageur il avait affaire, pardon, je ne savais pas qui j’avais l’honneur de recevoir ; que désirez-vous, que demandez-vous, monsieur l’abbé ? je suis à vos ordres.

Le prêtre regarda cet homme pendant deux ou trois secondes avec une attention étrange, il parut même chercher à attirer de son côté sur lui l’attention de l’aubergiste ; puis, voyant que les traits de celui-ci n’exprimaient d’autre sentiment que la surprise de ne pas recevoir une