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VI

LE RÉCIT.

— Avant tout, dit Caderousse, je dois, Monsieur, vous prier de me promettre une chose.

— Laquelle ? demanda l’abbé.

— C’est que jamais, si vous faites un usage quelconque des détails que je vais vous donner, on ne saura que ces détails viennent de moi, car ceux dont je vais vous parler sont riches et puissants, et, s’ils me touchaient seulement du bout du doigt, ils me briseraient comme verre.

— Soyez tranquille, mon ami, dit l’abbé, je suis prêtre, et les confessions meurent dans mon sein ; rappelez-vous que nous n’avons d’autre but que d’accomplir dignement les dernières volontés de notre ami ; parlez donc sans ménagement comme sans haine ; dites la vérité, toute la vérité : je ne connais pas et ne connaîtrai probablement jamais les personnes dont vous allez me parler ; d’ailleurs je suis Italien et non pas Français ; j’appartiens à Dieu et non pas aux hommes, et je vais rentrer dans mon couvent, dont je ne suis sorti que pour remplir les dernières volontés d’un mourant.

Cette promesse positive parut donner à Caderousse un peu d’assurance.

— Eh bien ! en ce cas, dit Caderousse, je veux, je dirai même plus, je dois vous détromper sur ces amitiés que le pauvre Edmond croyait sincères et dévouées.

— Commençons par son père, s’il vous plaît, dit l’abbé. Edmond m’a beaucoup parlé de ce vieillard, pour lequel il avait un profond amour.