Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 3.djvu/127

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empressement qui ne lui était pas habituel, même envers ses hôtes payants.

De temps en temps Caderousse lançait sur elle un regard rapide comme un éclair.

L’orage continuait.

— Entendez-vous, entendez-vous ? dit la Carconte ; vous avez, ma foi, bien fait de revenir.

— Ce qui n’empêche pas, dit le bijoutier, que si, pendant mon souper, l’ouragan s’apaise, je me remettrai en route.

— C’est le mistral, dit Caderousse en secouant la tête ; nous en avons pour jusqu’à demain.

Et il poussa un soupir.

— Ma foi, dit le bijoutier en se mettant à table, tant pis pour ceux qui sont dehors.

— Oui, reprit la Carconte, ils passeront une mauvaise nuit.

Le bijoutier commença de souper, et la Carconte continua d’avoir pour lui tous les petits soins d’une hôtesse attentive ; elle d’ordinaire si quinteuse et si revêche, elle était devenue un modèle de prévenance et de politesse. Si le bijoutier l’eût connue auparavant, un si grand changement l’eût certes étonné et n’eût pas manqué de lui inspirer quelque soupçon. Quant à Caderousse, il ne disait pas une parole, continuant sa promenade et paraissant hésiter même à regarder son hôte.

Lorsque le souper fut terminé, Caderousse alla lui-même ouvrir la porte.

— Je crois que l’orage se calme, dit-il.

Mais en ce moment, comme pour lui donner un démenti, un coup de tonnerre terrible ébranla la maison, et une bouffée de vent mêlée de pluie entra, qui éteignit la lampe.