Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 3.djvu/278

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avec moi : nous serons en petit comité, vous, ma mère et moi seulement. Vous avez à peine aperçu ma mère ; mais vous la verrez de près. C’est une femme fort remarquable, et je ne regrette qu’une chose : c’est que sa pareille n’existe pas avec vingt ans de moins ; il y aurait bientôt, je vous le jure, une comtesse et une vicomtesse de Morcerf. Quant à mon père, vous ne le trouverez pas : il est de commission ce soir et dîne chez le grand référendaire. Venez, nous causerons voyages. Vous qui avez vu le monde tout entier, vous nous raconterez vos aventures ; vous nous direz l’histoire de cette belle Grecque qui était l’autre soir avec vous à l’Opéra, que vous appelez votre esclave et que vous traitez comme une princesse. Nous parlerons italien, espagnol. Voyons, acceptez ; ma mère vous remerciera.

— Mille grâces, dit le comte ; l’invitation est des plus gracieuses, et je regrette vivement de ne pouvoir l’accepter. Je ne suis pas libre comme vous le pensiez, et j’ai au contraire un rendez-vous des plus importants.

— Ah ! prenez garde ; vous m’avez appris tout à l’heure comment, en fait de dîner, on se décharge d’une chose désagréable. Il me faut une preuve. Je ne suis heureusement pas banquier comme M. Danglars ; mais je suis, je vous en préviens, aussi incrédule que lui.

— Aussi vais-je vous la donner, dit le comte.

Et il sonna.

— Hum ! fit Morcerf, voilà déjà deux fois que vous refusez de dîner avec ma mère. C’est un parti pris, comte.

Monte-Cristo tressaillit.

— Oh ! vous ne le croyez pas, dit-il ; d’ailleurs voici ma preuve qui vient.

Baptistin entra et se tint sur la porte debout et attendant.