Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 3.djvu/325

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sait même si, pour faire sa cour à mon père, à madame de Villefort ou à mon frère, il ne me persécutera point aussi en tant qu’il sera en son pouvoir de le faire ? Voyons, franchement, je ne suis pas une femme que l’on doive mépriser ainsi sans raison ; vous me l’avez dit. Ah ! pardonnez-moi, continua la jeune fille en voyant l’impression que ces paroles produisaient sur Maximilien, je suis mauvaise, et je vous dis là sur cet homme des choses que je ne savais pas même avoir dans le cœur. Tenez, je ne nie pas que cette influence dont vous me parlez existe, et qu’il ne l’exerce même sur moi ; mais s’il l’exerce, c’est d’une manière nuisible et corruptrice, comme vous le voyez, de bonnes pensées.

— C’est bien, Valentine, dit Morrel avec un soupir, n’en parlons plus ; je ne lui dirai rien.

— Hélas ! mon ami, dit Valentine, je vous afflige, je le vois. Oh ! que ne puis-je vous serrer la main pour vous demander pardon ! Mais enfin je ne demande pas mieux que d’être convaincue ; dites, qu’a donc fait pour vous ce comte de Monte-Cristo ?

— Vous m’embarrassez fort, je l’avoue, Valentine, en me demandant ce que le comte a fait pour moi : rien d’ostensible, je le sais bien. Aussi, comme je vous l’ai déjà dit, mon affection pour lui est-elle tout instinctive et n’a-t-elle rien de raisonné. Est-ce que le soleil m’a fait quelque chose ? Non ; il me réchauffe, et à sa lumière je vous vois, voilà tout. Est-ce que tel ou tel parfum a fait quelque chose pour moi ? Non ; son odeur récrée agréablement un de mes sens. Je n’ai pas autre chose à dire quand on me demande pourquoi je vante ce parfum, mon amitié pour lui est étrange comme la sienne pour moi. Une voix secrète m’avertit qu’il y a plus que du hasard dans cette amitié imprévue et réciproque. Je