petite île dont j’ai souvent entendu parler aux marins qu’employait mon père : un grain de sable au milieu de la Méditerranée, un atome dans l’infini.
— C’est parfaitement cela, monsieur, dit Albert. Eh bien, de ce grain de sable, de cet atome, est seigneur et roi celui dont je vous parle ; il aura acheté ce brevet de comte quelque part en Toscane.
— Il est donc riche, votre comte ?
— Ma foi, je le crois.
— Mais cela doit se voir, ce me semble ?
— Voilà ce qui vous trompe, Debray.
— Je ne vous comprends plus.
— Avez-vous lu les Mille et une Nuits ?
— Parbleu ! belle question !
— Eh bien, savez-vous donc si les gens qu’on y voit sont riches ou pauvres ? si leurs grains de blé ne sont pas des rubis ou des diamants ? Ils ont l’air de misérables pêcheurs, n’est-ce pas ? vous les traitez comme tels, et tout à coup ils vous ouvrent quelque caverne mystérieuse, où vous trouvez un trésor à acheter l’Inde.
— Après ?
— Après, mon comte de Monte-Cristo est un de ces pêcheurs-là. Il a même un nom tiré de la chose, il s’appelle Simbad le marin et possède une caverne pleine d’or.
— Et vous avez vu cette caverne, Morcerf ? demanda Beauchamp.
— Non, pas moi, Franz. Mais, chut ! il ne faut pas dire un mot de cela devant lui. Franz y est descendu les yeux bandés, et il a été servi par des muets et par des femmes près desquelles, à ce qu’il paraît, Cléopâtre n’est qu’une lorette. Seulement des femmes il n’en est pas bien sûr, vu qu’elles ne sont entrées qu’après qu’il eut